Le lait

Je faisais partie des mères qui rêvaient d’allaiter.
J’avais tout préparé.
Les crèmes hydratantes, les coussinets, les livres, dès que j’arrivais chez la sage-femme je posais des multitudes de questions sur l’allaitement.

Je voulais allaiter plus que tout.

J’avais eu l’exemple de ma mère qui allaitait ses enfants, facilement et avec bonheur, la femme de mon père et ma tante, toutes trois parlaient de bonheur absolu, de lien fort, de moment privilégié.

J’étais prête.

Après un marathon de plus de 30 heures, l’oisillon est né.
La sage-femme l’a posé sur moi et immédiatement dans ma tête j’ai pensé:
“Je ne peux pas l’allaiter”.

Bloquée.

J’étais chamboulée. J’avais mal. J’étais fatiguée. Je n’avais pas imaginé un accouchement aussi violent.
J’ai tout de même mis l’oisillon au sein pendant la nuit et le lendemain matin.
Devant ma détresse les sages-femmes ont été exceptionnelles.
Très présentes.
Ne m’imposant pas leur façon de penser.
Me disant que parfois on ne choisit pas, me parlant également de la bonne santé de l’oisillon, de prendre mon temps.

Le lendemain l’oisillon a bu son premier biberon.
Et ce moment a été privilégié.
Je me suis sentie bien, il me regardait, la tension s’apaisait.
Je me sentais tout de même une mauvaise mère.
Celle qui se cache un peu pour donner le biberon.

Et puis j’ai compris une chose.
Tant que je n’avais pas vécu ce moment de la naissance je ne pouvais pas connaître mon choix.
Je voulais et je n’ai pas pu.
J’étais un peu traumatisée de cet accouchement.
Je ne l’aurais pas cru.

La bataille des pro et des anti-biberon/allaitement me rend triste, car parfois on ne choisi pas.
L’acte s’impose de lui même.
Le corps et les émotions s’emmêlent parfois.

Mais n’oublions pas.
Chaque femme allaite.
Au sein ou au biberon.

Mais elle allaite son oisillon.

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