Samedi quatorze novembre au matin je suis descendue dans la rue. Comme tous les jours je suis partie travailler. J’ai mes habitudes, je passe devant plusieurs bars et j’aime regarder les terrasses et écouter les différentes langues, j’imagine d’où viennent les touristes. Ce matin là, j’ai embrassé mes enfants en leur souhaitant une bonne journée avec cette angoisse irréelle que je ne reviendrais peut-être jamais. J’ai mis le nez dehors. Le vent, la lumière et le silence m’ont glacée. Il n’y avait aucune conversation a écouter. Je suis passée devant les terrasses qui étaient vides, les magasins avaient baissés leurs stores et je me suis demandé comment faire pour ne pas avoir peur. J’ai sacrément la trouille oui. À ceux qui me disent qu’il ne faut pas avoir peur je vous défie de ne rien ressentir un lendemain d’attentat dans le métro. Ce métro était désert et silencieux, cette sensation est indescriptible. J’étais seule sur le quai ce samedi matin à onze heures. J’ai pris le métro, j’ai travaillé à la boutique. En apnée. J’ai l’impression d’avoir retenu mon souffle jusqu’à quatorze heures. Heure où un arrêté préfectoral a demandé la fermeture Des magasins Parisiens. Rentrer vite. Je me suis… lire la suite →
Il y a quinze ans, lorsque ma mère m’a dit que j’allais être interne j’ai pleuré. J’avais seize ans. Ma mère était enceinte de sept mois. J’allais quitter la maison. l’inconnu se profilait. J’étais plutôt timide. Je ne connaissais rien à la vie. Louis Aragon. Mon lycée portait ce nom. À l’entrée de celui-ci était inscrit cette phrase Que serais-je sans toi que ce balbutiement. Cette phrase résonne encore dans ma tête. J’ai découvert Aragon autant que j’y ai découvert la vie J’allais apprendre à me détacher de mes parents. Apprendre à lier des liens, des vrais. Apprendre à vivre dans cette toute petite ville. J’y ai rencontré des êtres, tous plus intéressants les uns que les autres. J’ai partagé la chambre de plusieurs filles qui resteront bien dans ma mémoire. On a beaucoup ri. Vraiment beaucoup. Cet internat était un terrain de jeux. Rentrer à la maison le samedi midi et revenir le lundi matin. Les semaines défilaient et avaient leurs lots de joie et de chagrin. On a forgé nos personnalités là-bas, on a appris sur nous même. Nous étions libres. C’était un petit lycée Dans une petite ville. Il était le haut lieu de la liberté. Nous… lire la suite →
Je me souviens du jour où je t’ai acheté ce petit ensemble violet. Un violet lumineux. Une petite broderie ton sur ton bordant ton petit cou. Toi le petit brun tu étais magnifique dans ce violet moelleux. « C’est un violet de fille madame. » J’apprends donc que les couleurs sont sexuées. Je pensais naïvement que les couleurs étaient une affaire de goûts, de saisons,d’envies. Un violet de fille sur mon garçon donc. « Ça ne vous dérange pas? » Non. Mes fils portent des couleurs peu importe la catégorisation dans laquelle elles se trouvent. Mon petit brun est beau dans le violet. Il est confortablement installé dans sa gigoteuse aux motifs roses. Mon petit blond aime son foulard aux oiseaux. Et ça ne me dérange pas. Mon aîné réclame du parfum, des foulards et aime détailler les petits motifs de sa chemise. Ça ne me dérange pas non plus. Il se fiche de savoir si la couleur de son pull appartient bien au groupe garçon. Mes enfants portent donc des pois, des fleurs, des rayures, du violet, du doré et même du rose. Et ça ne me dérange toujours pas. « Maman avait envie d’avoir une petite fille! » Désolée de vous décevoir madame. Mais… lire la suite →
Il y a des bouffées de bonheur qui gonflent le cœur. Demain en sera une. Demain sera le jour de ta première rentrée. Celle que tu attends avec tant de hâte et de joie. Le jour où tu es né, l’école me paraissait si loin, presque intouchable. L’impression que tu resterais tout le temps ce petit nouveau-né. Et pourtant nous y sommes. Tu as grandi mon bonhomme, tu vis à cent à l’heure, tu questionnes, t’intéresse, tu es terriblement vivant. Je ne suis pas nostalgique des moments passés, au contraire, j’aime les avoir vécus et j’aime te voir grandir par dessus tout. La joie qui t’anime lorsque tu parles de l’école me comble. En cette veille de rentrée, pas de regrets ni d’appréhension mais au contraire le cœur gonflé de bonheur de te voir si grand. Ce soir nous ne préparerons pas ta tenue, nous ne cirerons pas tes chaussures, nous n’organiserons rien. Nous serons simplement ensemble avec les souvenirs de ce bel été, on se remémorera tes châteaux, l’eau salée et ton envie de courir partout. Cette pause estivale était douce, une bouffée d’air avant de reprendre notre petit rythme quotidien. Je vis cette première rentrée avec beaucoup d’impatience.… lire la suite →
Tu t’es fait attendre Tu as poussé mes limites au plus loin. J’ai appréhendé ta naissance, j’ai eu peur. Tu es né sereinement en balayant de tes petits yeux toute la douleur de ces neufs mois. Je me souviens de tes mains jointes. De l’hôpital calme, De la salle de naissance silencieuse. tu es arrivé simplement, avec douceur. il y a deux mois. Deux mois de vie dans mes bras. Une vie au rythme de ton souffle. Ton rythme qui s’est imposé à moi. Une mélodie silencieuse et régulière qui me berce. Je te garde dans mes bras. J’ai oublié les jours J’ai oublié les heures J’ai oublié le temps Je suis suspendue à ton souffle régulier. Tu aimes te lover Ta tête s’enfoui dans mes bras Tu cherches ta position et tu t’endors Tes membres lourds se détendent Je reste là parfois des heures à soutenir ton petit être Ton poids engourdissant mes membres Une douleur si douce. Des moments précieux avant cette rentrée qui va nous dévorer. Mon tout petit Les fenêtres sont ouvertes Je contemple la rue en te tenant dans mes bras. Août est là. Il fait chaud. Le bruit des terrasses inonde notre appartement et… lire la suite →
Un jour Il y eu le premier jour. Celui qui fait exploser nos émotions. L’euphorie et l’envie de crier au monde entier ta beauté. Toi, si petit encore, endolori par cette arrivée. Niché au creux de nous. Je t’ai contemplé des heures, analysant la finesse de ta petite personne. Comme si c’était la première fois. Tu ouvrais peu les yeux, tes gestes étaient lents et pourtant tout s’accélérait autour de nous. Une semaine Il y eu la première semaine celle qui me fit oublier la vie sans toi. Les gestes, les paroles, tout semblait être naturel. Nous commençons à avoir nos habitudes. Tes yeux s’ouvrent et le gris de ta pupille me gonfle le cœur. Nous étions quatre et cela paraissait évident. Tu grandis déjà, toi le petit glouton. La vie avec toi est douce. Deux semaines Il y eu la première quinzaine Celle oū l’on se dit que ça va très vite. Tu t’éveilles et tu nous suit du regard. Nous parlons de toi, parfois, en grammes et en centimètres. Mais cette vitesse nous donne à voir le plus joli des spectacles. Ton frère t’embrasse, te cajole. On devine le gris de tes yeux qui devient bleu. Çe gris… lire la suite →
Ma peau distendue me renvoie à cet état qui m’a tant effrayée et que j’ai finalement réussi a aimé. Cette peau s’est étirée pour laisser la place à ce petit être qui m’a tant fait peur. Une main sur mon ventre, je tâte et cherche en vain une présence. Je sens cette peau, flasque et tendre, délivrée de son petit habitant depuis peu. Les traces de son passage sont encore visibles. Je les contemple. J’aime les traces qui sont là. Elles marquent mon corps de façon indélébile. Comme si elles ne voulaient pas que j’oublie cette période pleine d’ambivalence. Elles me rappellent la douleur, l’angoisse et l’amour de ces neufs derniers mois. Ce spleen doux et léger me rappelle que nous sommes séparés à présent. Nous ne partageons plus le même corps. J’avais hâte d’être au bout, de le voir et de ne plus subir cette grossesse. Et puis je comprends petit à petit que de tels changements ne peuvent pas être anodins. Je comprends l’ambivalence que cet état a engendré. Mes cernes et mes douleurs me renvoient à la fin de cette cohabitation. Je suis nostalgique. Qui l’eut cru. Moi qui ait tant cru détester être enceinte. Je me… lire la suite →
Mon deuxième garçon est né. Il y a deux petites semaines. J’ai enfin dit au revoir à cette grossesse que je n’aimais pas. Sans regrets. Je n’aurais jamais cru dire ça un jour mais nous avons eu droit à un bel accouchement dans le calme. C’était un très beau moment et je m’étonne encore d’avoir pu l’apprécier tant l’ancrage du premier accouchement douloureux était présent. Et pourtant. Pas d’angoisses, peu de douleurs, pas de questions. Nous avons juste vécu le moment présent avec sérénité. Le premier soir où les deux garçons se sont endormis dans la même chambre je les ai regardés. L’appartement était calme. Mon regard passant de l’un à l’autre. Je me suis sentie apaisée. Avoir un deuxième enfant m’a fait me sentir mère. Ou plutôt je me suis sentie apaisée. Comme si tout était à sa place. Cette arrivée m’a comblée. Je suis rassurée qu’ils ne soient pas seuls, ils sont frères et grandiront côte à côte. Ils sont différents, cela se voit déjà. Petit blond et petit brun. Mes garçons. Ils se détesteront peut-être, n’auront peut-être aucun atomes crochus. Mais ce n’est pas grave. Ils seront toujours deux. Je pense que cela sera une force. Cette… lire la suite →
Le printemps est là. Les terrasses de la rue commencent à devenir bruyantes et ce bruit me ravi. Il me rapproche de toi. Je sais que plus le soleil les chauffera et plus ta naissance sera proche. Le soleil brille sur avril. Les manteaux laissent leur place à des tissus légers. Alors je souhaite que les terrasses se remplissent, qu’elles s’emplissent de monde et de bruit. Qu’elles marquent l’arrivée du printemps puis de l’été. Je souhaite que le bruit de la rue s’intensifie afin de t’accueillir dans cette effervescence que j’aime tant. La naissance c’est la tempête heureuse. Dehors comme dedans. Chez nous comme dans la rue. La rue bouillonne et je sens que toi aussi. Tes mouvements sont forts et intenses, la place se fait rare et tu gardes ta position, la même depuis des mois. Tu as le hoquet, mon ventre se déforme et interroge les passants, les enfants me demandent ce qu’il y a dedans. Eux aussi ont hâte de te rencontrer. Et puis, lorsque le vent du printemps s’engouffre dans la maison et fait claquer les portes tu sursautes. Je souris de te voir réagir aux sons. Je trouve ça incroyable que tu réagisses intérieurement au… lire la suite →
On ne choisit pas le sexe de ses enfants. Je n’avais aucune préférence. Vraiment. L’annonce qu’un petit garçon viendra agrandir notre famille m’a beaucoup émue. J’aurais accueilli une petite fille avec la même joie. Sincèrement, je n’ai aucune préférence pour le sexe. Les réactions que j’ai entendu autour de moi m’ont surprise et même un peu agacée. « Ma pauvre tu dois être déçue » « Tu seras obligée de faire un troisième pour la fille! » « Deux garçons tu n’as pas fini de courir! » « Les filles c’est tellement plus sympa à habiller » Oui parce que très souvent on me dit qu’avoir une fille est plus sympa qu’avoir un garçon. Ce qui est incroyable c’est que ces réactions ne sont pas isolées, je les entends très souvent. Alors non je ne suis pas déçue, au risque de décevoir ces personnes. Et l’envie d’un troisième enfant ne se décidera pas selon les sexes des précédents. Je suis assez attristée de voir que dans l’imaginaire collectif les filles sont mignonnes, calmes et agréables alors que les garçons sont durs, bagarreurs et pas coquets pour un sou. Lorsqu’on me souhaite du courage avec deux garçons je bous intérieurement. Je pense qu’avoir deux enfants c’est effectivement une organisation… lire la suite →