Le temps s’invite dans mes cheveux. Des cheveux blancs aiment me rappeler que le temps ne m’attend pas, qu’il suit son chemin. Je les ai comptés, arrachés, cachés, j’ai réfléchis à les teindre. Puis j’ai arrêté de vouloir dompter le temps. Et j’ai fini par les aimer. “Tu as des cheveux blancs, tu vas les teindre?” Non. J’aime l’idée que le temps se rende visible, il me rappelle que l’heure tourne, que les mois changent et que les années s’enchaînent. Ça me rappelle que mon oisillon grandit et qu’il découvre de plus en plus de choses. Il est ce que le temps m’a apporté de plus précieux. Les marques sont là pour nous rappeler que nous sommes vivants. Cette vie me comble au delà du fait d’être un peu moins brune chaque jour. Je suis consciente que mes paroles changeront sûrement lorsque j’aurais 40, 50 puis 60 ans. Je suis consciente aussi que ma condition de vie privilégiée me permette d’avoir de tels propos. Ressentir les marques du temps dans la solitude, dans la rue ou dans la maladie est un tout autre aspect. Je comprends aussi qu’on puisse avoir l’envie de figer le temps, de le stopper, de vouloir… lire la suite →
Je faisais partie des mères qui rêvaient d’allaiter. J’avais tout préparé. Les crèmes hydratantes, les coussinets, les livres, dès que j’arrivais chez la sage-femme je posais des multitudes de questions sur l’allaitement. Je voulais allaiter plus que tout. J’avais eu l’exemple de ma mère qui allaitait ses enfants, facilement et avec bonheur, la femme de mon père et ma tante, toutes trois parlaient de bonheur absolu, de lien fort, de moment privilégié. J’étais prête. Après un marathon de plus de 30 heures, l’oisillon est né. La sage-femme l’a posé sur moi et immédiatement dans ma tête j’ai pensé: “Je ne peux pas l’allaiter”. Bloquée. J’étais chamboulée. J’avais mal. J’étais fatiguée. Je n’avais pas imaginé un accouchement aussi violent. J’ai tout de même mis l’oisillon au sein pendant la nuit et le lendemain matin. Devant ma détresse les sages-femmes ont été exceptionnelles. Très présentes. Ne m’imposant pas leur façon de penser. Me disant que parfois on ne choisit pas, me parlant également de la bonne santé de l’oisillon, de prendre mon temps. Le lendemain l’oisillon a bu son premier biberon. Et ce moment a été privilégié. Je me suis sentie bien, il me regardait, la tension s’apaisait. Je me sentais tout… lire la suite →
La nuit est différente. Ta naissance l’a chamboulée. On ne dort plus, plus de la même façon. On est attentifs au silence. On l’écoute. On épie ton souffle, tes gestes, on est inquiets. Deux ans de sommeil près de toi. Et pourtant. J’écoute toujours, je retiens mon souffle, j’éponge ton front fiévreux. J’aime la nuit. J’aimerais pouvoir la vivre éveillée. J’aimerais tout noter pour ne rien oublier. Je me souviens des nuits lovée dans le canapé. Je me souviens de ton berceau. De ton lâcher prise. Des cent pas sur le parquet bruyant. Des nuits sans bruits à penser au futur, à toi, à notre vie à trois. La nuit n’est plus la même depuis toi. J’espère que tu aimeras la nuit. Voir les villes la nuit. Écouter son silence. Ou au contraire la rendre bruyante et vivante. J’espère que tu aimeras regarder tes enfants dormir. J’espère que la nuit t’apaisera. Elle cerne mes yeux mais est riche de ta présence. Je crois qu’elle ne sera plus jamais pareille. Même quand tu auras 10, 20 ou 30 ans. La pénombre me fera toujours penser à toi. Elle m’inquiétera toujours un peu aussi, si peu. À l’heure où tu vas commencer… lire la suite →
Un petit corps chaud posé contre moi. C’est le début de la nuit et tu pousses ton premier cri. Ce cri salvateur qui m’a tant fait pleuré. J’avais tant imaginé ce moment, de tant de façons différentes. Je ne l’avais pas imaginé si étrange, si bouleversant. Je ne me suis pas sentie mère, pas tout de suite. J’ai été perdue. Je me suis sentie liée à toi, pour toujours. J’ai été effrayée. Tes yeux grands ouverts plongés dans les miens. Tes gestes incontrôlés, ta bouche plissée. Je ne pouvais détourner mon regard du tien. À 22h54 j’ai arrêté de pleurer, de parler, j’ai arrêté d’avoir peur, je t’ai simplement regardé. J’ai pensé à ton père, à notre amour multiplié par ce moment présent, à tout ce que tu allais offrir à nos vies. Notre vie bouleversée par la tienne. Je t’ai contemplé des heures, des nuits, des jours, n’osant te manipuler de peur de te réveiller. Si petit. Ton odeur et tes gestes lents. Ton souffle chaud. Le temps s’est stoppé pour nous laisser admirer le petit être que tu es. Notre bouleversement. Le plus beau qui soit.
J’ai longtemps rêvé d’avoir un enfant. J’ai idéalisé la grossesse. Cette première grossesse est arrivée à une période difficile. J’étais imprégnée de la joie de créer la vie alors que ma mère se battait contre la mort. Première expérience contradictoire. Et puis j’ai fait cette fausse couche qui m’a anéantie. Les fausses couches sont courantes, je le sais. Mais je n’ai pas su me relever de cette épreuve. Ce mauvais moment m’a prit à vif. J’ai dit “Je n’aurais plus jamais d’enfants” Et bien évidemment je ne me suis pas arrêtée là. C’est donc avec beaucoup de distance que j’ai appris que j’étais à nouveau enceinte. J’ai essayé de ne pas me projeter trop vite, à tel point que j’avais du mal à réaliser mon état. J’ai détesté être enceinte. Je ne voyais que de l’angoisse dans cet état. L’échographie étant le passage le plus détesté bizarrement. Peur de l’annonce d’une anomalie, peur d’un retard de croissance, bref pas vraiment de plaisir. Après les nausées qui ont durées 5 mois, j’ai découvert mon ventre qui s’arrondissait. C’était un moment que j’attendais avec impatience. Et rien. J’imaginais une émotion intense, le début d’une nouvelle vie. Rien. J’ai ensuite passé 3… lire la suite →